Eclaircissement sur le blocage de l’industrie pétrolière française

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Blocage de l’industrie pétrolière française

On entend parler de pénurie, de grève dans l’industrie du pétrole, de dépôts et de raffineries, de terminaux pétroliers, de blocages internes ou externes, de réserves stratégiques. D’un article à l’autre, on entend tout et son contraire. Voici une tentative d’éclaircissement sur le fonctionnement de l’industrie pétrolière française et quelques éléments stratégiques qui en découlent.

L’industrice pétrolière en quelques mots.

99% du carburant consommé en France (tout secteur confondu : particulier, privé, professionnel, agricole, etc.) est importé.
Une faible partie en produit fini arrive aux ports de Dunkerke, la Rochelle et Fos-sur-mer. Mais la majeure partie arrive en produit brut, à raffiner. Il y a 3 ensembles portuaires d’arrivée : La Havre-Antifer / Donges-Saint Nazaire / Fos sur mer-Lavéra.
De là, le pétrole brut est acheminé dans les 8 raffineries françaises (5 Total, 2 Exxon Mobile (Esso) et 1 PetroIneos) via les pipelines (oléoducs sous-terrain). Les raffineries transforment le prétrole brut en carburant utilisable et part dans les dépôts de carburant, de nouveau par pipeline.
Les raffineries du Havre (Gronfreville l’Orcher et Gravenchon) déservent du carburant jusqu’à Paris et ses deux aéroports, directement via les canalisations. Orly et Roissy disposent de 8 jours d’autonomie avec leurs réserves et stocks tampons. Sur le chemin, des dépôts sont alimentés comme ceux de Rubis terminal. Une autre pipeline part de Douges et va jusqu’à Metz, et celle de Fos-sur-mer achemine du carburant jusqu’en Suisse en passant par Lyon.
Une fois dans les dépôts principaux (ceux directement connectés aux raffineries), le carburant est transporté par camions qui partent alimenter les stations-services et d’autres dépôts non connectés aux pipelines, d’où repartiront des camions pour alimenter d’autres stations-service. On compte au total 200 dépôts mais certains sont regroupés en grands ensembles (Rubis en regroupe 5 par exemple) et leurs capacités ainsi que leur intérêt stratégique diffèrent. Les dépôts appartiennent soit aux grands exploitants comme Total ou à des entreprises privées qui louent des espaces de stockage à des clients (aux grandes surfaces par exemple).

Eléments pour les blocages et les grèves.

A la source: l’arrivée des bateaux remplis de pétrole brut sur les terminaux portuaires. Celui du Havre en réceptionne plus de 40%, géré par le CIM (compagnie industrielle maritime) où la grève a été voté à plus de 90%. Ce sont donc les employés du port, entre autres, qui décident de bloquer les terminaux porturaires. Pas de bateaux déchargés au Havre , pas de produit à raffiner pour Gonfreville, Gravenchon et la raffinerie parisienne Grandpuits. De même pour Fos-sur-mer, réceptionnant 40% des produits bruts également, où les répercussions peuvent se faire ressentir jusqu’en Suisse si le blocage perdure. 25 bateaux étaient encore bloqués il y a quelques jours.

Ensuite les raffineries. 8 ont voté la grève en début de semaine. Gravenchon commence à lâcher l’affaire et reprend le travail sous la pression des non-grévistes. Si les employés votent la grève alors s’enchaîne l’arrêt total ou partiel des unités de production. Il faut 5 à 6 jours pour stopper une unité et autant pour la remettre en marche.

Si les raffineries ne produisent pas, les dépôts ne sont pas alimentés. Ces derniers disposent de stocks variables, allant de 3 à 15 jours pour les plus gros. Donc sans blocage, les dépôts continuent à approvisionner les stations pendant quelques jours voir semaines, même en cas de grève des raffinerines. D’où l’intérêt de les bloquer eux aussi pour impacter immédiatement. Les actions de blocage de dépôts sont parfois dûs à des grèves internes mais la plupart du temps elles sont générées par les grèvistes des raffineries à proximité, portuaires et parfois par une partie plus large de personnes en lutte (étudiants, salariés d’autres secteurs, nuit deboutistes) comme ce fût le cas ici pour Rubis.
Ensuite il y a les fameuses « réserves stratégiques ». Celles-ci sont stockées au sein même des dépôts, ou parfois dans des dépôts qui leurs sont consacrés. Sur l’ensemble du territoire, elles permettent de couvrir les besoins pendant 2 ou 3 mois. Donc si blocage de dépôt il y a, les réserves stratégiques sont elles aussi inaccessibles. Depuis une semaine, l’équivalent de quelques jours de réserves stratégiques ont été consommé, seulement dans des zones où les dépôts sont peut alimentés et où les capacités de stokage sont faibles.

Les dépôts les plus importants sont ceux qui sont directement en aval des raffineries, déservis par pipeline : on a Rubis bien sûr, mais aussi Gronfreville l’Orcher, Le Mans, Douges, ou Fos-sur-Mer. Puis on a les autres, plus excentrés mais stratégiques pour certaines régions comme celui de Douchy Les Mines dans le Nord, de Brest et de Lorient pour la Bretagne, et celui de Coignières (Yvelines) pour l’ouest parisien. Depuis une semaine, il y a eu environ une quinzaine de blocages de dépôt, pendant plusieurs jours ou parfois seulement quelques heures, systématiquement délogés par la police.

Vous l’aurez compris, pour tout bloquer, il nous faudrait :
– renforcer les blocages de terminaux portuaires (Le Havre et Fos-sur-mer)
– continuer le mouvement de grève au sein des raffineries
– coordonner une action de blocage illimité sur les dépôts du Havre, de Fos-sur-mer, de Rouen (Rubis), Douchy-les-mines (Nord), Donges (Loire-Atlantique), Brest, Lorient, Le Mans et Coignières (Yvelines). Et bien sûr, partout là où c’est possible.
– ne pas compter (que) sur la CGT

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